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L'espace presse

Communiqués de presse

A l’occasion du 14ème Rendez-Vous de la mondialisation organisé le 18 juin 2009 par le Centre d’analyse stratégique et le CEPII sur "Quels défis pour l’agriculture mondialisée ?" , LES ECHOS publient le point de vue de Marcel Mazoyer

18/06/09

Plaidoyer pour une nouvelle politique de prix agricoles

Marcel Mazoyer est professeur à AgroParisTech, chaire Francqui internationale des universités francophones belges

"En 2007 et 2008, le triplement des prix internationaux des principales matières premières agricoles a provoqué des émeutes de la faim dans plusieurs pays en développement. Ces prix élevés ont fait basculer dans la sous-alimentation chronique (la faim quasi quotidienne) environ 75 millions de pauvres. Parallèlement, des investisseurs de toutes sortes (fonds privés ou souverains, firmes agroalimentaires ou autres) cherchent à s’emparer de vastes superficies de terres dans les pays à bas salaires où la tenure de la terre n’est pas fermement établie."

"Ces événements n’ont rien de nouveau. Ils étaient même prévisibles. Depuis le milieu du XIXe siècle, des explosions de prix de ce genre ont lieu tous les vingt à trente ans sur les marchés internationaux de denrées vivrières de base. De plus, ces événements s’inscrivent dans un contexte où, depuis des décennies, la faim, chronique et silencieuse, affecte environ 850 millions d’êtres humains, dont la très grande majorité sont des paysans des pays en développement appauvris par la baisse tendancielle, très importante, des prix agricoles réels.

En effet, de 1950 à 1970, la révolution agricole contemporaine a battu son plein dans les pays développés. Cette révolution a reposé sur l’utilisation de tracteurs et de machines toujours plus puissants, d’engrais minéraux, d’aliments concentrés pour le bétail, de pesticides, de variétés végétales et de races animales hautement sélectionnées, et sur la spécialisation des exploitations agricoles. Elle a entraîné un accroissement très important de la productivité et une forte baisse des prix agricoles réels dans les pays concernés. De plus, certains de ces pays ont dégagé des excédents exportables croissants à des prix décroissants. C’est ainsi que le prix du blé sur le marché de Chicago, qui sert de référence aux prix internationaux, est tombé de 600 dollars la tonne en 1947 à 180 dollars en 1971.

En conséquence, de très nombreuses exploitations agricoles des pays développés ont disparu et des dizaines de millions de paysans des pays en développement, appauvris par la concurrence des produits importés à bas prix, ont migré vers les villes et les bidonvilles. La croissance de la production ayant ralenti tandis que la consommation continuait d’augmenter, les stocks mondiaux tombèrent en 1972 au-dessous du seuil de sécurité, soit 15 % de la consommation annuelle. A ce point, les négociants précipitèrent leurs achats, les prix montèrent au-delà des variations interannuelles habituelles, les spéculateurs accoururent et, en 1973-1974, le prix de la tonne de blé tripla, remontant à près de 600 dollars..."

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